“Le vélo va où ses yeux vont, le vélo tient, il fait du vélo, il avance, il avance, son père l’a lâché, il ne s’est rendu compte de rien, il avance, il tient, il n’est pas tombé, il roule, il pourrait rester sur le vélo toute la vie, la vie sur le vélo dans la petite rue devant la maison, et soudain c’est toute la rue qui change, c’est la rue liberté, c’est la rue de demain aller acheter le pain, il voit le ciel, sur le vélo il arrive à voir ça, la rue et le ciel en même temps, il est vivant.” Toutes les scansions de la vie dans une galerie de portraits : hommes, femmes, adolescents, jeunes adultes, seniors, vieillards… Portraits vagues, nécessairement vagues pour laisser à chacun son secret – cette part d’ineffable brouillard qui échappe à soi-même et aux autres.
Milène Tournier, Cent portraits vagues, éd. Lurlure, 2024.