En 1915, Adrienne Monnier fonde une librairie-bibliothèque de prêts, la Maison des Amis des Livres, au 7, rue de l’Odéon. Quelques années plus tard, Sylvia Beach ouvre en face, au n°12, Shakespeare and Company, son équivalent anglo-saxon. L’Odéonie est née. Entre les deux librairies, se construit dans l’entre-deux guerres un espace pour la pensée et le commerce de l’esprit, l’échange des idées et la défense de la littérature contemporaine, où se croisent James Joyce, André Gide, Valery Larbaud, André Breton, Louis Aragon, Colette, Gertrude Stein, Violette Leduc, Walter Benjamin, Gisèle Freund, Ernest Hemingway et bien d’autres. L’Ulysse de Joyce, partout rejeté par la censure, y verra le jour, en anglais, puis en français. Des rencontres, des publications, des lectures publiques, des expositions animent pendant vingt ans cet espace où se réinvente la vie intellectuelle autant que se développe, souterraine, une culture féministe et lesbienne.
À travers un montage de textes, « L’Odéonie ou la vie de l’esprit » rend hommage à un couple de libraires à l’énergie et l’indépendance hors normes, modèles de résistance au conformisme et source d’inspiration à laquelle notre époque gagnerait de s’abreuver.
Laure Murat, Passage de l’Odéon. Sylvia Beach, Adrienne Monnier et la vie littéraire à Paris dans l’entre-deux-guerres, coll. “L’imaginaire”, Gallimard, 2024.
photo d’Adrienne Monnier et Sylvia Beach