L’un prit très au sérieux le message inscrit sur l’étui de la guitare de son mentor Woody Guthrie : « This machine kills fascists », l’autre, sans trop y songer tira de son professeur de tennis, par ailleurs musicien, quelques rudiments de guitare flamenco. Très vite pour l’un, plus lentement pour l’autre, le destin s’écrivait. En une phrase chaotique, comme si les touches d’une vieille Underwood s’emballaient, au risque de s’enrayer. Puis… chacun dans sa chambre – quand le succès venu, amis, foule et simples curieux ont quitté la place – s’invente sans cesse un peu de liberté. Bob Dylan, comme il se baptise… Sincerely, L. Cohen, comme il signe sa lettre en musique Famous Blue Raincoat…
Ces noms maintenant légendaires, ces “grands noms” oblitèrent l’activité plus secrète à laquelle se sont livrés ces alchimistes du verbe à la voix singulière. C’est cette solitude peuplée, cette lande vierge à la lisière du chant et du poème que, dans une performance inédite, nous voudrions hanter.
Jean-Pierre Petit
Bob Dylan, Chroniques, trad. de l’anglais (États-Unis) par J.-L. Piningre, Fayard, 2005, rééd. Folio, 2010.
Leonard Cohen, Les perdants magnifiques et Jeux de dames, trad. de l’anglais (Canada) par Michel Doury, Christian Bourgois, 2002 – Le Livre du Désir, trad. de l’anglais par J.-D. Brierre et Jacques Vassal, Points, coll. Poésie, 2013.
Soirée proposée en partenariat avec France Culture. Réalisation : Alexandre Plank